La banalisation des actes de violences conjugales : Quand la victime devient coupable

La banalisation des actes de violences conjugales : Quand la victime devient coupable

Un jour, je me suis lancée dans une discussion avec un homme qui disait ne pas cautionner les violences conjugales, mais trouvait tout de même des excuses à ceux qui battent leurs épouses. Ce dernier disait que si un homme bat son épouse, c’est qu’elle l’a bien cherchée. J’avoue qu’à un moment j’ai oublié "la sororité" et j’ai fini par jeter l’éponge. J’ai juste abandonné. Je lui ai dit que son discours ne me choquait pas mais que ça m’exaspérait. Pour lui, une gifle n’est rien d’autre qu’une simple gifle. C’est seulement un rappel à l’ordre et que de toutes les manières elle l’avait bien cherchée.

Après avoir passé en revue ses propos et constaté l’ardeur avec laquelle il défendait ces hommes qui battent leurs épouses, je suis arrivée à la conclusion, qu’il parlait de la sorte, car il avait tout simplement été élevé dans ce sens. 

Quand la victime devient coupable

Lorsque les femmes qui subissent ces maux osent en parler, on s’en indigne au point d'être considérées comme dramatiques et capricieuses. La première chose qu’on leur demande souvent est : qu’as tu fait pour l’énerver ? Oui, car pour eux c’est toujours elle qui pousse monsieur à réagir. Nous sommes dans une société ou la phallocratie a naturellement fait de l'homme l'être suprême. Dans un foyer, il est celui qui a le droit de prendre les décisions, il a le droit de vie ou de mort sur son épouse et ses enfants. Ne dit-on pas que le paradis d'une femme se trouve aux pieds de son mari ? Beaucoup de femmes au Mali grandissent avec ce discours en tête, elles s'y conforment et qu'il en soit ainsi. Cette mentalité, ces idées reçues confèrent ce pouvoir de correction aux hommes afin de remettre leurs épouses sur le droit chemin, au moindre égarement. « Une gifle n'est rien d'autre qu'une gifle. C’est juste une correction pour un acte qu’elle n’aurait pas dû poser», disent-ils quand d'autres s'indignent.

En plus des  hommes qui raisonnent ainsi , il existe aussi une catégorie de femmes qui acceptent et soutiennent qu’il est tout à fait normal qu’un  corrige son épouse par des coups, ou par "une gifle". C’est ainsi qu’on doit ramener à la raison une femme qui s’égare et oublie la place de “soumise” qu’elle occupe dans le foyer. Il existe cependant une autre catégorie de femmes qui se révoltent contre les femmes qui subissent et acceptent ces violences de la part de leurs maris. Elles affirment  que ces dernières manquent de dignité et ne sont pas de vraies femmes.

Mieux vaut prévenir que guérir

Aujourd’hui ce n'est qu’une petite gifle. Demain, deux petites gifles, qui deviennent ensuite, et malheureusement le début d’une série de gifles qu’elle devra certainement recevoir à chaque fois que monsieur trouve qu’elle dépasse les limites. Des petites gifles qui l'amènent à se recroqueviller sur elle-même par peur. Des  petites gifles qui transformeront un foyer paisible en un foyer de tension, pire en un champ de bataille. Des petites gifles qui ne sont  autre qu'une correction dit-on mais qui finissent par la faire perdre, d’une façon ou d’une autre.

Ne laissez pas une simple gifle détruire votre foyer. Ne laissez pas une simple gifle faire de vous un monstre aux yeux de ces  personnes à qui vous avez juré amour et protection. Ne condamnez pas ces femmes à souffrir et à élever leurs enfants dans la peur et la rancœur. Ce qu’on oublie souvent, c’est que cette injustice peut s’accompagner d’un corollaire de conséquences qui peut contribuer à la création d’un environnement précaire pour tout le monde. Oui, une femme oppressée nourrit une haine et une volonté de vengeance vis à vis de son oppresseur.

UN TEXTE DE DJENEBOU KEITA