« Finzan » de Cheick Oumar Sissoko

« Finzan » de Cheick Oumar Sissoko

« Nous enfantons le monde. Il nous violente. Nous créons la vie. Elle nous est refusée. Nous produisons les vivres mangés à notre insu. Nous créons de la richesse. Elle est utilisée contre nous. Ces phrases sont celles de Nanyuma, personnage principal du film Finzan de Cheick Oumar Sissoko.

Un cri de cœur sur l’inégalité de participation des femmes à la définition des structures politiques et économiques et au processus de production. En effet, il s’agit spécifiquement de l’impossibilité d’accès des femmes à la propriété foncière et de l’incertitude des droits de jouissance des terres alors que les femmes participent de plus en plus à la sécurité alimentaire, notamment depuis les grandes sécheresses de 1973 et de 1984. Et dans le film "Finzan", les femmes prennent position contre les autorités qui veulent acheter le mil à bas prix. L’une d’entre elles lance : « Dugu Tigi, les femmes veu­lent parler ! Nous savons que vous ne nous aimez pas ! Beaucoup de ces femmes ont trimé comme femmes de ménage dans les villes pour vous autres qui croyez avoir le monde. Ton ami crâne avec un boubou qui coûte près de 200 000 francs gagnés sur la misère des pauvres. Nous n’avons pas ça en cinq ans. Aussi on ne se tuera plus pour des gens comme vous. »

Dans le film Finzan, Nanyuma, veuve et vic­time du lévi­rat, tente pour­tant de se révol­ter contre sa condi­tion. Toute la com­mu­nauté tente de la rai­son­ner. Une femme lui lance : « Nanyuma, nous enfan­tons le monde et il nous vio­lente. Patience et rési­gna­tion sont nos recours. »

Par ses films, Sissoko sug­gère ainsi de façon expli­cite le manque de dia­lo­gue qui existe entre les hommes et les femmes. Il montre les nom­breu­ses vio­len­ces conju­ga­les dont les femmes sont vic­ti­mes. En plus d’actes qui se tra­dui­sent par des coups et bles­su­res et de la vio­lence sexuelle faite de har­cè­le­ment et d’agres­sion. Le lévi­rat, c’est l’obli­ga­tion pour une femme d’épouser le cadet de son mari défunt. C’est une pra­ti­que qui conti­nue aujourd’hui et dans la majo­rité des eth­nies du Mali. Tout ceci pour essayer de garder la cohé­sion de la famille mais aussi les forces vives de la famille, la femme et ses enfants. Cependant, très souvent la ques­tion de l’héri­tage se pose aussi. Le Patriarche est le res­pon­sa­ble de toute la famille et c’est lui qui doit déci­der de cette ques­tion. La com­mu­nauté des biens est encore une réa­lité dans les zones rura­les. »

Source /CLAP NOIR

Assitan Siga Fadiga